« La place de Dieu », le regard de Bernard Bienvenu

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- Bernard Bienvenu paysage

Par La Voix de l'Ain

La liberté d’expression est évidemment un bien précieux. Est-elle pour autant un but indépassable de notre horizon culturel qui nous interdirait toute réflexion à propos de l’usage qui en est fait ?

Il n’y a plus guère aujourd’hui que les hommes politiques et les religions dont on peut impunément se moquer, voire attaquer leurs symboles et représentations. S’agissant de ces dernières, et quand cela s’exprime sous la forme de films, de tableaux ou de pièces de théâtre, on assiste depuis toujours à une polémique par médias interposés ou internet quand ce n’est pas désormais par des manifestations plus ou moins violentes… Fin octobre à Paris, des jeunes manifestants ont voulu interdire la représentation d’une pièce intitulée : « Sur le concept du visage du fils de Dieu ». On se souvient, au printemps dernier, de la tentative de destruction d’une photographie appelée « Piss Christ » au musée d’Avignon. Et on peut s’attendre à d’autres réactions quand viendra en décembre à l’affiche du Théâtre du Rond-Point à Paris, une pièce dénommée « Golgotha picnic ».

Le hasard des événements a voulu que dans le même temps où certains voulaient interdire l’accès au Théâtre de la Ville, un attentat aussi criminel qu’imbécile, a détruit les locaux du journal Charlie Hebdo, le jour de la sortie de son numéro titré « Charia Hebdo » avec pour « rédacteur en chef », le prophète Mahomet. Et certains de rassembler dans une même condamnation des catholiques intégristes au comportement excessif mais qui agissent à visage découvert, et des criminels dont on ne connaît pour l’heure ni le nom ni les motivations !

La liberté d’expression est évidemment un bien précieux. Est-elle pour autant un but indépassable de notre horizon culturel qui nous interdirait toute réflexion à propos de l’usage qui en est fait ? « Quel est ce sacré qui tremble devant le rire ?  » s’interroge justement dans une tribune parue dans Le Monde, le directeur du Théâtre du Rond-Point. Oui, quel est ce sacré qui pousse certains croyants à se sentir personnellement blessés quand on caricature jusqu’à l’obscène ce qu’ils considèrent comme l’essence même de leur foi ? La religion n’est pas seulement ce qui relie des croyants qui doivent accepter pour eux-mêmes la critique ou les quolibets. Elle est ce qui renvoie à une réalité mystérieuse et transcendantale nommée « Dieu » et que les musulmans refusent même de se représenter, de peur de le défigurer ! À Assises depuis vingt-cinq ans, toutes les religions répètent que la violence « n’est pas la vraie nature de la religion ». Ce Dieu auquel des milliards de gens croient n’est pas qu’un concept ni une idée vague mais pour eux, une Personne qui mérite au moins autant que d’autres, le respect…

Dès lors, comment réagir sans se croire victimes d’une société « christianophobe », ni se voir « comme une minorité assiégée » (Cardinal Vingt-Trois) ? On voit bien que l’Église catholique peine à trouver la bonne réponse entre le silence honteux et les manifestations coupables de groupuscules intégristes.

« Dieu n’est pas mort » contrairement à ce que croyait Nietzsche ! Et les caricatures qui en sont faites aujourd’hui encore, en témoignent plutôt ! À nous tous, croyants ou incroyants, de ne pas nous enfermer dans nos certitudes, pour que nous entretenions par un dialogue permanent et sans anathème, le débat sur la place de Dieu dans notre culture commune.

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